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L'Écrhistoires
ecriture creative
20 janvier 2018

Consigne d'écriture n°18 - «Incipit tiré d'un livre»

 

La consigne

 

Incipit au hasard d'un livre Phrase tirée de Gaspard de la nuit, Aloysius Bertrand, Mercure de France, 1920 ( 103-104). Livre III, V, Le Clair de Lune : « Deux ladres se lamentaient sous ma fenêtre, un chien hurlait dans le carrefour, et le grillon de mon foyer vaticinait tout bas. »

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Mon texte

 

Deux ladres se lamentaient sous ma fenêtre, un chien hurlait dans le carrefour, et le grillon de mon foyer vaticinait tout bas. Sous mes pieds-nus, le plancher grossier et sur ma peau la chaleur moite de cette nuit de juillet. Curieux de ce qui provoquait les plaintes des deux misérables, je m'approchai et jetai un regard avide sur l'extérieur : un vieillard s'entretenait avec Auguste, le mendiant presque officiel de notre quartier. Depuis que nous habitions la rue, je le croisais régulièrement. Toujours vêtu de quelques puantes guenilles, il traînait ses vieilles guêtres sous nos porches, vivotant de charité et d'absinthe. Régulièrement, la maréchaussée le ramassait pour le déposer à l'hospice d'où il sortait au plus vite pour rejoindre ce qu'il considérait comme son foyer. Selon Louise, la lavandière, Auguste avait laissé sa raison et sa jambe gauche lors de la guerre de Crimée. L'homme, inoffensif, rendait de menus services aux honnêtes gens contre un peu de pain. Même le père Antoine le traitait presque avec bienveillance alors que l'homme d'Église montrait une intransigeance peu commune envers la vermine des rues. Pour l'heure, Auguste subissait la colère du vieillard. Une obscure querelle où il semblait question d'une affaire de cœur ainsi que du vol de 20 francs. Vivement pris à parti, notre mendigot reculait à mesure que son vieil interlocuteur élevait la voix. Hélas, malgré mon intérêt pour l'affaire, je prenais cette dernière en cours de route. Désormais, Auguste se défendait âprement :

— C'te calotte! J'aurais dû la recorder c'te toupie ! Plutôt l'trou que ça ! J'ai jamais vu tes vingts balles. Plutôt faire la tortue que rincer un zigue. D'façon, la gueuse t'avait laissé.1

Malgré sa silhouette chétive, le vieux souleva le mendiant par le col... Si je voyais ses lèvres bouger, impossible d'entendre ce qu'il disait. Encore une fois, Auguste protesta vivement :

— Pas ma faute si la coquine t'a rincé ! Tout ça pour ses guibes2

Le pauvre hère ne put continuer, secoué en tout sens par son compère. Je me penchais un peu, espérant mieux voir la scène quand Marie m'interrompit :

— Ferme donc cette fenêtre et viens dormir.

Avec un soupir, j’obtempérais et me recouchais. Après plusieurs minutes à me retourner dans le lit, je me rendis à l'évidence : entre les ronflements sonores de mon épouse, replongée dans le sommeil, et la harangue sous nos fenêtres : impossible de m'endormir. Il fallait que ces traîne-savates empêchent le repos des honnêtes gens ! Mon sang s'échauffa et bientôt je me relevais, résolu à leur lancer le contenu de notre pot de chambre. Hélas, nulle miction n'avait rempli le récipient et, aveuglé par la fatigue et la colère, je jetais quelques habits sur mes épaules et sortait armé d'un tisonnier.

La dispute avait dégénéré... L'infirme gisait à présent dans le caniveau, inconscient, tandis que le vieux continuait à lui crier des injures. Résolu, je lui demandai de déguerpir au plus vite s'il ne voulait pas que j'en appelle aux forces de police. Sourd à mes menaces, il changea de cible et d'une poigne solide m'agrippa le bras. Sans plus raisonner, je levais le tisonnier, espérant qu'il me lâcherait. Le bougre ne bougea pas d'un pouce et je le frappai violemment sur la tempe. Le vieillard s'écroula dans un bruit mou. Pour ne plus se relever. La peur au ventre devant mon forfait, je me réfugiais chez nous, fermai à double tour et attendit l'aube. Déjà, je me voyais couvert d'opprobre, condamné au bagne ou, plus probablement, à la guillotine. C'est ma femme qui apaisa mon angoisse :

— Tu sais ce que m'a appris Louise ? Auguste, le mendiant... Il a été arrêté pour meurtre. Il a tué un vieil homme pour le détrousser. C'est avec lui qu'il se querellait cette nuit, tu te souviens ? Bah... Il fallait bien que cela arrive. Un vagabond pareil...

Je hochai la tête :

— Au moins les honnêtes gens seront plus tranquilles...

Le feu bien reparti, je reposais le tisonnier en souriant.

 

1Calotte : teigneuse ; Recorder : tuer ; Faire la tortue : jeûner ; Rincer: voler ; Zigue : ami

2Rincer : voler ; Guibe : jambe ;

 

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11 janvier 2018

Fonctions des passages descriptifs

 

Dans tous les ateliers de l'Écrhistoires abordant la fiction, nous insistons sur une chose : toute bonne scène possède une fonction. Si vous ne voyez pas à quoi sert tel ou tel passage, il faut au mieux le retravailler, au pire le supprimer. Il en est de même pour la description. Sans fonction précise, autant éparpiller les éléments qui la constituent au fil de votre récit...

 

Faire avancer le récit

 

En premier lieu, la description peut faire avancer le schmilblick... Par exemple pour préparer une scène à venir. Ainsi dans un roman policier, décrire une pièce avec un indice qui traîne ici ou là, offre l'opportunité d'amener le récit vers la résolution du crime. Et quel plaisir, lors de la relecture d'un roman à énigme -ou whodunit en anglais- de découvrir ces éléments au fil de l'ouvrage !

 

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Caractériser un personnage

 

Ensuite la description peut compléter la caractérisation d'un personnage. Imaginons un exemple... Une femme psycho-rigide que nous appellerons Liliane. Elle souffre peut-être même de TOC1. Ainsi Liliane pourrait tenir sa maison de manière obsessionnelle et une description de sa cuisine exagérément immaculée montrera cet aspect de sa personnalité.

Décrire l'environnement d'un personnage pour le caractériser est un outil intéressant. Elizabeth George, auteure de romans policiers, insiste sur ce point dans Mes secrets d'écrivain  : « Décrivez l'environnement d'un personnage et vous montrez qui il est ».

 

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Une question de rythme

 

Nous venons de passer en revue les deux fonctions que peut posséder une scène. Il reste une utilité que la description offre et qui lui est particulière : freiner le récit. Un procédé qui s'avère parfois salutaire.

Un passage descriptif provoque une rupture dans la narration, une pause, durant laquelle le lecteur ralentit. Dans les récits dont l'intrigue est complexe ou le rythme très soutenu, une respiration peut être bienvenue. Mal utilisée la description peut exagérément étirer l'action et lasser le lecteur. Il faut donc savoir doser et seule la pratique le permet aisément. Bref on revient toujours aux fondamentaux...



Et vous, vous utilisez les descriptions dans quel but ?

1Troubles obsessionnels compulsifs

23 décembre 2017

Consigne d'écriture n°17 - «Horoscope»

 

La consigne

 

Écrivez un horoscope -fantaisiste ou sur un ton sérieux- pour l'année 2018. Faites-le pour le nombre de signes que vous voulez. Enfin, vous pouvez tout à fait choisir d'utiliser les signes chinois ou même la numérologie. Amusez-vous !

 

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Mon texte

 

Bélier (21 mars – 20 avril) 

Humeur

Cette année vous vous sentirez plus mouton que bélier. Il y a des périodes comme ça... Alors que vous aimez tant foncer tête baissée, la morosité vous transformera en petite chose malléable et flasque. Vous n'aimez pas cela ? Dites-vous que vos proches apprécieront !

Amour

Célibataire, si votre élément est le feu, vous brûlerez peu en 2018. Restez donc chez vous. Et mettez Youporn dans vos favoris. En mai, risque de tendinite chronique.

En couple, le bélier a beau ne pas être châtré, quand on ressemble à un stérilet on réfléchit avant de fonder une famille. La contraception, parlons-en...

Travail

Si vous avez un emploi, vous travaillerez. Sinon... ben non.

Taureau (20 avril – 20 mai)

Humeur

Après la pluie, le beau temps. Sauf en période de mousson. Évidement. Bref une année maussade. Investissez dans les sudoku.

Amour

Célibataire, vous devriez sortir plus souvent... À force de ne compter que sur vous-même pour la bagatelle, vous risquez d'être plus bœuf que taureau.

En couple, ce printemps vérifiez votre front ami taureau... Les cornes ne concernent-elles bien que votre signe ? Non, parce que fouiller son téléphone, ça peut être utile. Immorale mais utile.

Travail

Vos collègues sont agaçants ? Vous risquez fort d'être agacé, et même de voir rouge. Ils sont sympas, dites-vous que ce doit être vous l’emmerdeur du bureau. Dans tous les cas 2018 ne sera pas l'année des ambitions. Sauf peut-être à Candy Crush grâce auquel vous pourrez au moins réussir dans un domaine.

Gémeaux (21 mai – 21 juin)

Humeur

Après avoir lu votre horoscope, vous risquez d'être de mauvais poil. Tournez vous vers l'astrologie chinoise. Ou La boule magique 8.

Amour

Célibataire, et sinon, vous en êtes où de votre collection timbres ? Oui, celle commencée en avril 1997. Si vous n'avez pas de collection de timbres, c'est le moment d'y penser sérieusement. 2018 l'année de la philatélie !

En couple, vous aurez de soudaines envies d'acheter du Destop. Pensez à la congélation, c'est plus discret.

Travail

Vous saviez que la carrière de monsieur Patate n'exige que peu de compétences ? Lancez-vous, mais pas trop loin.

 

Cancer (22 juin – 22 juillet)

Humeur

Arrêtez donc de faire la gueule, ça donne des rides. Et ne souriez pas, vous avez l'air niais.

Amour

Célibataire, apprenez à vivre seul, sans amour et sans tendresse. Sinon les professionnels, c'est bien. Vous êtes pauvre ? prenez-vous en main et vendez vos charmes -laid s’abstenir, ça pourrait vous miner le moral-.

En couple, arrêtez de chercher la petite bête. Après tout, les morpions sont nos amis.

Travail

Répétez avec moi : non, glander sur Facebook ne fait pas parti de votre poste. Jouer au Dénimeur non plus. Alors ne vous étonnez pas des regards haineux de vos supérieurs.

Lion (23 juillet – 23 août)

Humeur

Imposez-vous l'écoute de toute la discographie de Justin Bieber. Deux fois. Ça fais du bien quand ça s'arrête ? Et voilà, vous êtes de meilleure humeur. Cette méthode vous sera particulièrement utile cet hiver. Puis au printemps et en été. Pour l'automne, essayez Jul.

Amour

Célibataire, Rabbit qui vibre, esprit plus libre. Bref, vous ne pourrez compter que sur vous-même. Comme d'habitude.

En couple, vos projets d'avenir étant aussi réalistes que la candidature de Loana à l'Académie française, contentez-vous de regardez la télé, l'allié des unions durables.

Travail

Reprendre vos études pourrait être une idée lumineuse. Ou de la drogue, plus coûteux mais plus efficace.

 

Vierge (24 août – 22 septembre)

Humeur

Méfiez-vous donc des couteaux cette année. Ça pique. Surtout planté dans le dos. Sinon faites du sport, avoir des courbatures vous distraira de votre vie médiocre.

Amour

Célibataire, si vous avez un(e) voisin(e) mignon(ne), allez donc lui emprunter son Nutella. Vous pourrez compenser. Parce que la vie n'a rien d'une comédie romantique. Surtout pour vous.

En couple, si vous êtes infidèle, attention à ne pas vous faire attraper par l'officiel(le). Vous êtes aussi fidèle que Lassie quand elle était vivante ? Mais pourquoi !?

Travail

Votre patron est un con ? Normal, il vous a engagé. Mais sinon 2018 sera placé sous le signe de la tranquillité.

 

Balance (23 septembre – 23 octobre)

Humeur

Vu que Vénus et Mars s'en balancent, essayez la méditation. Ou la marijuana. Ça vous détendra. Pour la seconde proposition, oubliez. Avec votre malchance, vous allez vous faire chopper.

Amour

Célibataire, vous pensiez vraiment lever ce(tte) blond(e) aussi sexy que les fesses pommelées de David Gandy ? Merci pour le fou rire. Achetez-vous une console, les jeux vidéos c'est la vie !

En couple, si vous vous laissez aller à pratiquer le coït, vous risquez -au choix- un claquage, de procréer ou de rester coincés. Bref, bouquinez, c'est plus prudent. Consacrez cette année à l'oeuvre de Balzac, il y a de quoi faire...

Travail

À force, vous êtes devenu un professionnel de la paresse. À vous voir à votre poste, qui croirait que vous n'en foutez pas une ? Bien joué ami balance.

 

Scorpion (23 octobre – 22 novembre)

Humeur

De petits maux de santé vous minera le moral cette année. Si vous êtes constipez, vous aurez du mal à faire caca. Prévoyez quelques sudoku, ça vous occupera.

Amour

Célibataire, bougez votre fondement et inscrivez-vous sur un site de rencontre. Vous serez toujours seul mais ça meublera vos soirées.

En couple, en février, la lune sera en vierge, prévoyez du lubrifiant. Ou dormez sur le canapé. Car oui, c'est une année à thème.

Travail

Si vous n'avez pas dormi sur le dit canapé et que vous travaillez assis, prévoyez d'emmener une bouée. Et repoussez donc votre séance d'aqua-poney.

 

Sagittaire (23 novembre – 21 décembre)

Humeur

Vous angoissez parce que vos bonnes résolutions de la nouvelle année n'ont pas tenu le premier mois ? Nulle inquiétude ami sagittaire, vous êtes juste faible. Ence 2018 lâchez donc prise et acceptez la mollesse de votre caractère.

Amour

Célibataire, à la fin de l'année, vous allez probablement faire une rencontre surprenante et pleine d'émotion. Sans doute avec de l'herpès génital. Consultez et n'oubliez pas de prévenir vos ex.

En couple, le même problème d'herpès que vos petits camarades célibataires ? Si vous êtes fidèle, posez-vous des questions.

Travail

Si vous travaillez, RAS. Si vous êtes à la recherche d'un emploi, idem. Mais arrêtez de croire que Pôle emploi vous aidera à trouver du boulot, à votre âge il serait bon de fuir le pays magique des Bisounours.

 

Capricorne (22 décembre – 19 janvier)

Humeur

Cessez donc de faire chauffer la carte de crédit et rappelez-vous : si c'est gratuit, c'est joli. Si vous résister aux sirènes de la consommation, cette année sera plutôt sereine.

Amour

Célibataire, comme on l'a dit, les économies sont de mises. On renonce donc aux amours tarifées et on lui préférera une séduction sans dépense. Si vous êtes vilain et sans conversation, mettez donc à contribution votre vieille collection de porno des années 90.

En couple, vous avez bien de la chance, vous pouvez toujours essayer de soutirer de l'argent à votre moitié. Si vous êtes marié sous le régime de la communauté, cela ne servirait à rien. Môman avait raison pour le contrat de mariage...

Travail

Ne rêvez pas à une augmentation, si vous n'êtes pas capable de gérer votre propre salaire, il est probable que vous soyez un élément médiocre de votre entreprise.

Verseau (20 janvier – 18 février)

Humeur

En mars, la pleine lune en Balance en Trigone de soleil vous mettra de bonne humeur. On ne s'excite pas ami Verseau, trigone ne sous-entend rien de cochon. Dommage...

Amour

Célibataire, rien de sexuel dans un trigone, on vous a dit. Alors sortez de ce site qui vous promet un plan à trois pour la soirée. Ça n'arrivera pas. Sauf si vous avez un compte en banque plus rempli que votre cervelle. Ou des seins.

En couple, peut-être un trio, oui, mais au Uno. Ou au Trivial Pursuit. En plus, vous allez sans doute perdre.

Travail

En 2018, vous ne compterez pas vos heures supplémentaires. Votre patron non plus, alors dites adieu à votre week-end à Venise en mai.

 

Poisson (19 février – 20 mars)

Humeur

Méfiance, votre entourage n'est qu'une bande de ratés assoiffés de sang. Montrez-leur que vous n'êtes pané de la dernière pluie. Conseil pour 2018 : la solitude est la solution. Vraiment.

Amour

Célibataire, attention, cette année l'eau mouille et quand c'est mouillé, faut partager. Vous pouvez toujours essayer les boîtes échangistes. Si vous être repoussant(e), faites boire votre proie.

En couple, dans la même idée, vous savez ce qu'on dit ? Si c'est mouillé, faut pas gâcher.

Travail

Cet été, au lieu de porter votre costume/tailleur du dimanche, mettez donc du déodorant, comme le dit le proverbe « Peu importe la beauté d'une truite, elle sentira toujours le poisson. »

 

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9 décembre 2017

Consigne d'écriture n°16 - «Une fable»

 

La consigne

Écrivez une fable. Pour la forme, libre à vous... Mais surtout amusez-vous !

 

 

Mon texte

 

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La punk et le joueur de sitar

Une punk en soucis de voisinage

À force de jouer à fond de sa guitare

Vit la police, si elle n'était point sage

Lui promettre quelques mois au mitard.

Hélas, la rebelle, sourde à ces menaces

S'en alla défier tout le quartier

Et s'écria au centre de la place :

« Fuck the police, vous faites vraiment chier ! »

Un galant, surprenant cette complainte

Et trouvant la punk de fort belle mine

Voulut savoir à quoi rimait ses plaintes

Et voici ce que lui dit la coquine :

« Toutes les commères s'en vont en cabale

Car, mon mignon, âme esseulée s'ennuie

En mal d'amour pour que mon cœur s'emballe

Je joue du punk à toute heure de la nuit. »

Le damoiseau émut par tant de grâce

Lui fit alors cette proposition :

« Si ma sérénade vous laisse de glace

Je prendrais publiquement position

Sur l'honneur, je punirais ces commères

D'avoir alerté ces maudits gendarmes

Mais si mes chants vous rendent moins amère

Vous me céderez et rendrez les armes.

Dès lors, abandonnant votre colère

Vous ne jouerez que de mon instrument

Et serez comblée par les quelques airs

Que je vous offrirais en tant qu'amant. »

La punk, attendrie, en fit la promesse

Et le soupirant sortit son sitar

Il en joua si bien, avec tant d'adresse

Qu'elle voulu aussi en jouer sans retard.

L'amour ayant conquis ce cœur volage

Ses guitares se turent désormais

Confirmant ainsi ce puissant adage

Il vaut bien mieux sitar que jamais.

 

 

25 novembre 2017

Consigne d'écriture n°15 - «Logo rallye musical»

 

La consigne

Cela commence avec une explosion Choisissez un album que vous appréciez -en français hein...-. Vous devrez inclure chaque titre de chanson. Par exemple, pour le dernier album d'Orelsan, il faudrait inclure : la fête est finie, San, basique, tout va bien, défaite de famille, la lumière, bonne meuf, quand est-ce que ça s'arrête, Christophe, zone, dans ma ville on traîne, la pluie, paradis, notes pour plus tard. À toi de jouer !

    

Mon texte

 

Pour cet exercice, j'ai choisi un album qui a accompagné mes jeunes années. Sorti lorsque j'avais 15 ans, « Alors »  du génial groupe de rock français Pigalle, je ne saurai trop vous recommander de l'écouter si vous ne connaissez pas. Je devais donc inclure dans mon texte : alors, geindre, faut pas s'inquiéter, Betty, à quoi servent les prières, parking, joyeux anniversaire, qu'importe les spasmes, ronde, si dormir faisait, allaient-ils s'aimer ?, Il Incesta, anguille, fond de cale, il y a dans les rues de la ville, il faudra bien t'asseoir.

 

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Alors que ses journées consistent à écouter geindre les clients, elle-même ne se permet pas la moindre lamentation. Pour ses collègues, elle reste la petite boulotte du poste 201. Celle toujours de bonne humeur, prête à s'esclaffer à la machine à café, la gentille blonde qui ne perd jamais son calme. Même quand le vingtième appel de la journée s'ouvre sur des insultes. D'ailleurs, les nouveaux se retrouvent sous son aile et, depuis huit ans qu'elle travaille dans l'immense centre d'appel, elle a formé la majorité des employés. Parce que personne ne reste très longtemps dans le call center. Tante Josiane lui dit souvent qu'elle finira par craquer, qu'elle échouera en maison de repos, sa cervelle de moineau noyée dans les calmants. Qui peut subir une telle pression sans finir cinglé ? « Faut pas s'inquiéter pour moi, Josiane. » répond en souriant Betty. Puis elle repart en chantonnant un refrain des années 80. Mais elle ne démissionne pas.
Le matin, elle se rend à pied à l'arrêt de bus. À Basfroi, Antoine monte et se faufile à côté d'elle. Régulièrement le jeune homme, un grand échalas aux yeux globuleux, lui propose un ciné. Il a deux passions dans la vie : regarder la F1 à la télé et les gros seins. Faut dire que Betty est abondante de partout et Antoine s'adresse toujours à sa poitrine avec beaucoup de tendresse. Elle décline mais il ne baisse pas les bras. Il supplie le Dieu Nichon pour qu'un jour la blonde lui cède. Mais à quoi servent les prières en matière de sexe ? Betty continue de refuser en souriant.
Ce mardi ne fait pas exception. Comme toujours, elle entre par le parking pour pointer plus rapidement. Betty allume son ordinateur avant de se tourner vers sa voisine. Elle lui claque une bise par dessus la cloison. La collègue lui lance un généreux « Joyeuxanniversaire ! Trente ans, ça se fête ! ». Betty avait complètement oublié l’événement et, toute à sa surprise, elle regarde Aurélie sans répondre. La grande brune, aussi fine et molle que du fil dentaire, plaisante un moment sur son grand âge puis retourne à son poste. Trente ans... Betty a trente ans. La jeune femme sent son estomac tressauter et des points noirs dansent devant ses yeux. Avant de pouvoir s'abandonner à cette angoisse, le téléphone sonne. Qu'importe les spasmes de panique qui montent en elle, il lui faut répondre. Replaçant son sourire habituel, Betty se plonge dans le travail. Elle subit les humiliations habituelles avec son pragmatisme légendaire. La douleur arrive en une petite heure. Avant la fin de la journée, la migraine sera intolérable et le casque insupportable. Depuis quelques mois, son médecin l'a arrêtée plusieurs fois et insiste pour qu'elle consulte un ORL. Elle a souri au docteur mais ne fera rien.
Peu avant sa pause, elle reçoit une convocation chez Trottier. Une sueur glacée la fait frissonner : le chef de plateau délègue tout aux superviseurs alors pourquoi veut-il la voir ? La jeune femme se lève et l'étau semble se resserrer autour de son crâne. Comme si son cœur, désormais logé derrière son front, voulait s'échapper. En passant devant le mur vitré du couloir, elle jette un coup d’œil sur sa silhouette ronde et tire plusieurs fois sur sa tunique. La migraine s'intensifie et Betty se demande comment elle va pouvoir parler. Si dormir faisait passer les symptômes... Mais parfois elle se lève avec la douleur. Elle masse sa nuque en marchant. Le grand chauve l'attend, son costume gris impeccable. Depuis deux mois, tout le monde sait qu'il est d'une humeur d'ogre un jour de disette. Il faut dire qu'un petit scandale secoue le centre d'appel. Une rumeur persistait depuis longtemps sur lui et Caressi, une téléconseillère aux allures de poupée gonflable. On avait remarqué leur parade nuptiale. L'homme marié ne cessait de mater la jeune femme et cette dernière passait son temps à minauder avec lui. Bientôt les paris avaient été lancés : allaient-ils s'aimer et commettre l'adultère ? Puis on avait appris que madame Trottier demandait le divorce. Elle les aurait surpris en fort mauvaise posture.
Betty sait tout cela et qu'elle risque de s'en prendre plein à la tête. Le chef de plateau commence son discours bien huilé. Chiffres à l'appui, il lui reproche de manquer de dynamisme. Ensuite il lui passe un enregistrement et souligne chacune de ses faiblesses. Face à ce procès, Betty garde le silence. La douleur augmente encore. Mais il attend qu'elle s'excuse, qu'elle promette de faire mieux, de devenir une téléconseillère modèle. La jeune femme, incapable de parler, se contente de lui sourire, contrite. Ce qui semble agacer Trottier qui, le regard froid, lui lance :
« Je suppose qu'il ne faut pas s'étonner que votre mollesse ne se cantonne pas seulement à vos fesses. »
La valse des points noirs s’accélèrent et Betty a l'impression qu'on lui enfonce un sabre dans la boite crânienne.
C'est là que la colère arrive.
Une colère dont elle ne se savait pas capable. Elle a pourtant eu son lot d'injustices, Betty... Même quand elle se souvient de l'alcoolisme de maman. Même quand le moment affreux lui revient, ce que papa a fait. Cette nuit où il incesta.
Betty essaie de revenir à la réalité mais le moment présent glisse comme une anguille entre ses pensées. La chaise de bureau est toute légère entre ses mains et c'est sans aucune lenteur, sans aucune mollesse qu'elle la lève au-dessus de sa tête. Elle frappe. Et frappe encore. Elle n'aurait jamais cru que tuer quelqu'un ferait si peu de bruit. Celui-ci n'empire même pas sa migraine. Bien moins que les voix aigres dans le casque... Il y a du sang sur sa tunique. Sur ses mains. Il ne respire plus mais la flaque de sang continue de s'étendre sur la moquette grisâtre. C'est joli ce contraste... Elle prend le téléphone.
La police arrive très vite. Bientôt, elle se retrouve à expliquer :
« Faut noter que j'vous ai appelé. Que je me suis livrée tout de suite et tout ça. Faut que j'appelle un avocat ? Comme dans les séries ? Parce que je suis honnête. Je connais pas d'avocat moi... Ni rien. Ça va coûter cher ? J'suis pas à fond de cale mais j'suis pas riche... Notez-le que j'suis pas riche. Que je vous suive ? Je risque de rentrer tard ? J'aime pas rentrer la nuit. Il y a de ces cinglés dans les rues de la ville... J'veux pas me faire agresser. Même que l'autre soir, y avait des racailles dans le bus. Et j'étais toute seule. J'ai eu peur en montant. Je savais pas si je devais rester. Puis je me suis dit « Betty, il faudra bien t'asseoir alors vas-y, ne les regarde pas, c'est tout». Mais j'ai eu peur. Ça a souvent peur... Une femme seule...  »
Personne ne semble l'écouter, alors Betty se penche vers celui qui la pousse et murmure : « On pourrait pas s'arrêter faire une course, m'sieur l'agent ? Sinon j'pourrais pas faire de gâteau. »
Puis elle ajoute, avec un sourire éclatant :
« Aujourd'hui, c'est mon anniversaire. »

 

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11 novembre 2017

Consigne d'écriture n°14 - «Explosion»

 

La consigne

 

Cela commence avec une explosion

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Mon texte

Tout a commencé avec une explosion.

La journée me promettait une symphonie de contraintes. Un lundi comme les autres, avec son lot de ragots autour de la machine à café, sa ribambelle de courriers à ouvrir, de mails à trier, d'appels à transférer. Mon tailleur gris semblait assorti à mon emploi du temps. Des mois que je me désolais quotidiennement sur l'échec de ma vie : dix ans sans évolution professionnelle -secrétaire éternellement dévolue aux tâche ingrates- et une trajectoire amoureuse fade comme une soupe de navets... Même mon chat me faisait la gueule depuis que je l'avais abandonné pour une croisière moribonde avec ma mère. D'ailleurs j'étais à deux félins de devenir la folle aux chats : ce cliché de la vieille fille dont nous nous moquions tant mes copines et moi. Maintenant, elles sont toutes trop occupées, avec des marmots partagés avec leurs ex-maris et des familles décomposées comme l'est mon existence. Sauf que moi je n'ai rien à recomposer. Alors je continue à me lamenter, semaine après semaine. Sur ma solitude, l'ingratitude de mes proches, ma mère et sa mémoire en dentelle, ma sœur et ses problèmes de fric, mon cousin et ses cures de désintoxication. Ma thérapeute, lasse d'entendre mes jérémiades, a espacé nos séances.

9h32. Une enveloppe de plus. L'invitation s'adressait à la patronne de ma patronne. Un carton épais et mat fleurant bon les petits fours et les coupes de champagnes autour d’œuvres snobinardes. Je savais que madame Grimalier ne se rendait pas aux vernissages. La garce profitait, en plus d'une carrière florissante, d'une horde d'amants. Plus séduisants et plus jeunes que ne devraient le permettre les convenances. Pas le temps pour hanter les galeries d'art. Bref, cette entrée gratuite pour le royaume des couguars me faisait de l’œil. Je m'imaginais déjà : moi et ma petite robe noire qui ne m'allait pas si mal... Je me dégoterais un artiste de vingt ans à la barbe fournie persuadé de faire face à une femme de pouvoirs. Dans l'espoir que je finance sa carrière balbutiante de photographe underground, il se jetterait dans mon lit.

Alors oui, je n'avais pas résisté à l'attrait de mon fantasme. Le carton avait rejoint ma mauvaise imitation de sac haute couture. Rien que de sortir un lundi soir, ailleurs qu'au cinéma du coin -mon abonnement mensuel me tenant lieu de vie sociale-, c'était un séisme dans ma routine.

Ma petite robe noire et moi, on s'est offert le luxe d'un taxi.

Mon niveau d'attente revu à la baisse, j'attendais des plaisirs simples de la soirée : un moment à m’imaginer dans la peau d'une autre. Tant pis pour l'artiste de vingt-cinq ans sans le sou et sous mon charme de femme mûre... Oui, si je pouvais me gaver de petits fours en bonne compagnie, ce serait une réussite !

Le lieu, étroit et à moitié désert, se trouvait coincé entre un restaurant à sushis et un bar à tapas. Le genre de galerie miteuse à servir du mousseux à la place du champagne et des toasts au pâté au lieu de verrine de mousseline saumon fumée sous sa chantilly de fromage de chèvre. Tant pis.

Puis une explosion.

De couleurs et d'émotions. Une toile immense pour ce lieu minuscule. Le tout résolument contemporain. À mille lieux des impressionnistes que j'adore.

Une explosion de force dans les coups de pinceaux.

Là, quelque part dans mes entrailles tièdes, une chaleur monte. Mes yeux me brûlent. Chaque courbe me murmure un secret. Pour moi seule.

Rien ne peut empêcher ma bulle d'amertume d'éclater, fichant dans mon cœur comateux des bris de douleur et de désir. Devant moi, l’œuvre se trouble, filtrée par mes larmes.

Finalement je suis vivante.

 

14 octobre 2017

Consigne d'écriture n°12 - « Une de journaux »

La consigne

 

Il s'agit de choisir parmi les trois une de journaux proposées et de prendre le gros titre comme point de départ. On utilise ce dernier comme source d'inspiration pour produire ce qu'on veut : poème, petite histoire, anecdote,... La seule contrainte ? Le titre du texte sera celui de la une choisie.

 

20min

 

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Mon texte

L'accueil est à revoir

 

L'asphalte trempée ne reflétait pas même la lueur de la pleine lune, complètement dissimulée par des nuages plus épais que l'air moite. Seule la lumière blanchâtre des éclaires illuminait de temps à autre les platanes qui bordaient la nationale. Au volant, la femme pinça les lèvres :

      — Arrête cette putain de radio !

Elizabeth s'exécuta sans demander son reste... Après tout, cette virée était son idée. Même qu'il lui avait fallu insister lourdement pour convaincre Angeline. La petite rousse avait bien conscience que sa compagne n'avait accepté que pour avoir la paix...

Après huit ans, leur couple était en train de sombrer. Inexorablement. Cette mise au vert de quarante-huit heures serait peut-être leur dernière chance. Angeline n'en pouvait plus. Non, elle n'en pouvait plus de ces innombrables silences, de ces nuits à dormir en droites parallèles, incapables de se rejoindre pour un peu de tendresse. Si au moins elles se disputaient... Sans doute eut-il mieux valu des cris et des portes qui claquent plutôt que ces jours ternes qui s'accumulaient comme des bons de réduction sur un frigo familial.

L'orage semblait s'être encore rapproché et le tonnerre, assourdissant, fit sursauter la conductrice :

— On devrait s'arrêter...

Devant le silence d'Elizabeth, elle s'agaça :

      — Quelle idée à la con aussi...

      — Tu veux quoi ? Pardon de vouloir casser la routine ! De vouloir un week-end romantique...

Comment Angeline aurait-elle pu lui en vouloir ? Alors qu'elle tentait de se concentrer sur la route, sa gorge se noua... Elle ne comprenait pas pourquoi ça leur arrivait. Épuisée par le boulot, elle avait négligé Elizabeth. Cela durait depuis si longtemps qu'il lui semblait désormais impossible de changer les choses. Est-ce que l'amour ne suffisait pas ? Quelle souffrance que de contempler l'agonie lente et silencieuse de leur couple !

Angeline eut à peine le temps de déchiffrer le panneau :

      — Un hôtel !

Le petit chemin de terre qu'elles prirent se transforma bientôt en sentier boueux au bout duquel se tenait l'établissement annoncé. Il se dressait au milieu de champs abandonnés, avec des lignes sévères et une façade décrépie. Quelques genévriers bordaient bien le chemin mais, sur le terrain lui-même, seulement des mauvaises herbes... Alors que le ciel d'encre ne montrait aucune étoile, un éclair illumina une terrasse au carrelage ébréché au centre de laquelle trônaient, sous des bâches jaunâtres, plusieurs tables à la ferraille rouillée. Leurs chaussures s'enfoncèrent dans la boue en un grand sploutch visqueux. À gauche de la porte en verre fumée, Elizabeth déchiffra le nom de l'établissement : « Au genévrier fleuri ». Malgré son dépit, Angeline ne voulu pas envenimer la situation :

      — Au moins c'est une vraie aventure...

Bagages à la main, elles franchirent le seuil pour se retrouver dans une entrée sombre. Derrière la banque d’accueil en formica, couleur banane digérée, se tenait une grosse femme aux cheveux vaguement auburn et à l'air revêche. Une cigarette sans filtre pendait mollement entre les lèvres fuchsia. Ses joues flasques et rougeaudes tremblotèrent dans une tentative de sourire qui ne parvint qu'à faire ressortir sa couperose. Au dessus des pommettes noyées dans la graisse, deux yeux minuscules étaient surplombés par de fins sourcils redessinés au crayon bordeaux.

Surmontant l'aspect peu aimable de l'hôtelière, Elizabeth s'avança :

       — Bonsoir... Auriez-vous une chambre disponible ?

       — Combien d'nuits ?

       — Deux, s'il vous plaît.

Le regard porcin se plissa :

       — On paye d'avance et en liquide.

       — Pas de problème...

Contre les billets, fourrés aussitôt dans sa blouse fleurie, elle leur tendit une clef à laquelle pendouillait une pierre grossièrement marquée d'un numéro :

      — Si y a besoin... J'bouge pas.

Le couple gravit l'étroit escalier pour entrer en silence dans la chambre. De gros tournesols s'étalaient sur le papier peint jauni et la lumière du plafonnier en rotin y jetait une lueur fade. Le lit, à la couverture orangée, occupait les deux tiers de la pièce. À sa gauche, une table de chevet marron accueillait un vieux téléphone beige à cadran sur un napperon ajouré. Dans un coin, une petite table bancale tenait lieu de bureau et offrait une pile de magasines féminins aussi vieux que la décoration. Balançant leurs sacs par terre, les jeunes femmes ouvrirent sur une salle de bain minuscule, son carrelage moucheté de bleu marine était fendillé et des stickers de coquillages dissimulaient mal quelques fissures.

Elizabeth se saisit d'une serviette de bain et déplia le tissu rêche pour révéler une tache jaunâtre :

      — Dégueulasse...

La jolie rousse déglutit... Angeline avait raison : toute cette histoire de week-end était un fiasco. Alors qu'elles auraient pu dîner dehors, parler devant une assiette bien garnie, voilà qu'elles se retrouvait dans le pire hôtel du pays. Les bottes couvertes de boue, la faim au ventre et la pluie qui battait contre les vitres criblée de crottes de mouche... Elle se tourna vers sa compagne, certaine de découvrir un regard plein de reproches :

      — Je suis dés-

Le teint mat d'Angeline avait viré au rouge brique et elle avait les yeux fermés. Elizabeth inspira profondément comme pour trouver le courage d’affronter :

      — Ecoute je-

Le rire éclata sans prévenir. Un rire joyeux et gourmand qu'elle n'avait plus entendu depuis des mois. Angeline, pliée en deux, tenta de reprendre sa respiration mais dès que son regard croisait celui de sa compagne, la crise reprenait. Tant et si bien que des larmes coulèrent bientôt sur ses joues rondes. Elizabeth pouffa avant de s'esclaffer franchement et, à son tour, se retrouva incapable de se reprendre.

Lorsqu'elles se calmèrent, elles s'assirent sur le dessus de lit orange. Fatiguée, Elizabeth osa poser sa tête sur l'épaule de la petite rousse qui leva la main pour lui caresser les cheveux. Sans doute l'établissement était un hôtel miteux et que l'accueil était à revoir ainsi que la propreté du lieu mais qu'importe... Tout était parfait.

 

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12 octobre 2017

Voyage en poésie : le Haïku

Née au début des années 80, je fais partie de ceux qui ont grandi avec le Club Dorothée et ses animés venus tout droit du Japon. Une manière très pop-culture de commencer à s’intéresser au pays du soleil levant. Plus tard, à l'adolescence, en plus des quelques manga que je lisais, je me suis plongée avec délice dans les contes de Ugetsu Monogatari ou les romans de Tanizaki et de Kawabata. Quant au haïku, qui nous intéresse aujourd'hui, je ne l'ai découvert d'une fois adulte, lorsque j'ai eu l'impression d'avoir fait le tour de la poésie occidentale. Ce pan de la littérature japonaise reste un univers vaste et passionnant que j'ai eu logiquement envie de partager ici.

 

I. Une forme, une histoire

 

Le haïku est un court poème japonais de 17 syllabes fractionné en trois séquences : de 5 syllabes, 7 syllabes et 5 syllabes.

Impossible d'aborder le haïku sans mentionner une des figures majeures de la poésie classique japonaise : Matsuo Munefusa. Plus connu sous le seul pseudonyme de Bashō 芭蕉, qui signifie « Bananier », il est né dans une famille de Bushi -la noblesse guerrière-. Né aux alentours de Kyoto en 1644, sa vie fut vouée à la poésie. Il connaîtra le succès à Edo (Tokyo) puis renoncera à la vie mondaine pour prendre l'habit de moine et s'installer dans un ermitage. Devant ce dernier il aurait planté un bananier, ce qui lui aurait valu son nom de plume. Il meurt en novembre 1694 après avoir cessé de s'alimenter et demandé à ses disciples d'écrire des vers pour lui. Sur sa tombe, on plantera un Bashō...

Le poète a largement contribué à l'éclosion de la poésie populaire mais il a surtout imposé un certain esprit du haïku, une forme de simplicité, de pureté, de légèreté. Souvent en lien avec la nature et parfois constitué d'une touche d'humour le haïku est souvent décrit comme la poésie de l'instant.

Un exemple parmi les 2000 haïku composés par le maître Bashō ?

 

un vieil étang

古池や

furu ike ya

une grenouille plonge
蛙飛びこむ

kawazu tobikomu

le bruit de l’eau
水の音

mizu no oto

Pour ceux qui voudraient se plonger dans l’œuvre de Matsuo Bashō, il existe de nombreuses traductions française de bonne qualité dont l'intégral des haïku de Bashō.

 

 

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II. Une forme, quelques principes

 

Comme je l'écrivais précédemment on considère souvent le haïku comme la poésie de l'instant. Mukai Kyorai, élève de Bashō, explique dans Kyorai shō que le haïku « C'est simplement ce qui arrive en tel lieu, à tel moment ». Pour parvenir à cette « capture poétique » , chaque mot est ciselé, chaque section travaillée. Peut-être à cause de cette idée de moment présent, on a souvent pensé ou dit que le haïku était une forme poétique du zen. Or pour René Sieffert, spécialiste de la littérature japonaise, l'école de Bashō n'a aucun lien avec le zen.

Maintenant que les choses sont claires, parlons un peu plus de ce qu'est un haïku. Tout d'abord il ne comporte pas de rime. Aucune. Oui, cela nous éloigne grandement de la poésie classique française -et c'est tant mieux!-. Il doit aussi être autonome, c'est à dire qu'il doit se suffire à lui-même. C'est une œuvre à part entière.

Le haïku comporte trois séquence, la première et la troisième de 5 syllabes et la deuxième de 7. Les poètes préconisent d'utiliser un vocabulaire simple -compris par tous- et précis. Par exemple on utilisera plus volontiers le terme chêne que celui d'arbre.

Les thèmes sont très varié bien que la nature tient une place importante dans nombre de recueils de haïku. Ce qu'on oublie parfois est que l'humour est présent chez de nombreux poètes japonais.

Bashō lui-même utilisait le terme de kokkei 滑稽 qui signifie humoristique, cocasse. Non seulement l'image évoquée par le poème peut être amusante mais les jeux de mots sont légions chez certains auteurs. Ainsi, Issa, un des quatre maîtres classiques du haïku, écrivait au dix-neuvième siècle :

Le vent du printemps

découvre les fesses

du couvreur

 

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III. Quelques instants poétiques

 

Parce que pour comprendre et apprécier les haïku, il n'y a rien de plus simple que d'en lire quelques uns, voici certaine de mes préférés :

 

« Oh ! une luciole qui vole

Je voulais crier « Regarde ! »

Mais j'étais seul »

                                  Taïgï

« Le marais, moite

Le silence blême et lourd

Soudain un canard !... »

                                Takasaki

« Sot le 31 décembre

Tout aussi sot

le Jour de l'An »

                              Shiki

« Dans l'eau que je puise

scintille le début

du printemps »

                            Ringaï

« Une fleur tombée

remonte à sa branche !

Non ! c'était un papillon »

                         Moritaka

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     Cet article n'étant qu'une courte bafouille, n’hésitez pas à lire quelques ouvrages sur le haïku ou de haïku si le sujet vous intéresse. Je vous signale d'ailleurs l'ouvrage passionnant de Philippe Costa Petit manuel pour écrire des haiku.

Le haïku est un exercice très agréable, je ne peux que vous encourager à vous y essayer... D'ailleurs lorsque je dirige des ateliers d'initiation à l'écriture poétique, le haïku en est une partie incontournable...

 

Et vous, ami lecteur, amateur d'haïku ?

 




21 septembre 2017

Verbes de parole : utilité et limites


      La semaine dernière nous avons abordé la question du lien entre réalisme et dialogues. Vous le savez, la catégorie boîte à outils me permet d'aborder exclusivement la partie artisanale de l'écriture, la partie technique. Concernant les dialogues, nous avions déjà vu sa typographie, aussi j'ai pensé qu'il était temps d'évoquer les verbes de parole.

Qu'importe le nom qu'on leur octroie : verbes de parole, de dialogue ou introducteurs, ce sont des termes que tout écrivant utilisera un jour. Faire le point sur la manière la plus efficace de les utiliser me paraissait indispensable.



I. Verbes de dialogue : définition et liste



Un verbe de dialogue/parole ou introducteur est un verbe qui introduit la parole.

Pour trouver une liste de ces fameux verbes, il suffit de faire une recherche sur le Net et les résultats nous confirment la richesse de la langue française :

Aboyer ; accepter ; acclamer ; accorder ; accuser ; achever ; acquiescer ; adhérer ; adjurer ; admettre ; admonester ; s’adresser ; affirmer ; affranchir ; ajouter ; alléguer ; anathématiser ; ânonner ; annoter ; annoncer ; apostropher ; appeler ; applaudir ; apprendre ; approuver ; arguer ; argumenter ; arrêter ; articuler ; assener ; assurer ; attester ; avancer ; avertir ; aviser ; avouer ; babiller ; badiner ; bafouer ; bafouiller ; balbutier ; baragouiner ; bavarder ; bégayer ; bénir ; beugler ; blaguer ; blâmer ; bougonner ; bourdonner ; brailler ; bramer ; bredouiller ; brusquer ; cacher ; cafouiller ; capituler ; céder ; certifier ; chanter ; chantonner ; chuchoter ; choisir ; clamer ; combattre ; commander ; commenter ; compatir ; compléter ; composer ; concéder ; conclure ; confesser ; confier ; confirmer ; congratuler ; considérer ; conspuer ; conter ; contester ; contredire ; converser ; couiner ; couper ; cracher ; crachoter ; crépiter ; crier ; critiquer ; croire ; débiter ; décider ; déclamer ; déclarer ; décrire dédouaner ; déduire ; se défendre ; dégoiser ; demander ; démentir ; démontrer ; dénoncer ; déplorer ; détailler ; deviner ; deviser ; dévoiler ; dialoguer ; dire ; discourir ; discréditer ; discuter ; disserter ; dissimuler ; distinguer ; divulguer ; douter ; ébruiter ; éclater de rire ; égosiller ; égrener ; éluder ; s’émerveiller ; émettre ; emporter ; encenser ; enchérir ; encourager ; enguirlander ; énoncer ; enquérir ; entamer ; enflammer ; entonner ; entrer en matière ; énumérer ; épeler ; ergoter ; s’esclaffer ; estimer ; essayer ; établir ; éternuer ; s’étouffer ; étonner ; s’étrangler ; exagérer ; examiner ; exhorter ; exiger ; expliquer ; exploser ; exprimer ; s’excuser ; exposer ; exulter ; faire miroiter ; faire remarquer ; faire fanfaronner ; féliciter ; flatter ; finir ; formuler ; fustiger ; garantir ; se gargariser ; geindre ; gémir ; glisser ; glorifier ; gloser ; glousser ; gouailler ; grincer ; grognasser ; grogner ; grommeler ; gronder ; haleter ; haranguer ; hasarder ; héler ; hésiter ; honnir ; huer ; humilier ; hurler ; imaginer ; s’impatienter ; implorer ; s’incliner ; indiquer ; infirmer ; informer ; injurier ; innocenter ; insinuer ; insister ; insulter ; s’instruire ; s’insurger ; intercéder ; interdire ; s’intéresser ; s’interloquer ; interroger ; interrompre ; intervenir ; intimer ; inventer ; inventorier ; invoquer ; ironiser ; jauger ; jubiler ; juger ; jurer ; justifier ; lâcher ; lancer ; lire ; lister ; louer ; marmonner ; maugréer ; médire ; menacer ; mentir ; mépriser ; mettre en garde ; minauder ; minimiser ; monologuer ; murmurer ; se moquer ; narguer ; narrer ; nasiller ; négocier ; nier ; objecter ; objurguer ; obliger ; obtempérer ; observer ; s’offusquer ; opiner ; ordonner ; outrager ; palabrer ; papoter ; parlementer ; parler ; penser ; permettre ; pérorer ; persifler ; pester ; philosopher ; piaffer ; plaider ; plaisanter ; se plaindre ; plastronner ; pleurer ; pleurnicher ; polémiquer ; pontifier ; postillonner ; pouffer ; poursuivre ; préciser ; préférer ; présenter ; prétendre ; prier ; proférer ; prohiber ; promettre ; prôner ; prophétiser ; proposer ; protester ; prouver ; psalmodier ; quémander ; questionner ; quêter ; rabâcher ; raconter ; radoter ; railler ; rajouter ; râler ; rapporter ; rappeler ; rassurer ; raviser ; réaliser ; récapituler ; réciter ; réclamer ; reconnaître ; rectifier ; récuser ; redire ; refuser ; réfuter ; regretter ; se réjouir ; relater ; remarquer ; remettre en question ; renâcler ; renauder ; renchérir ; renseigner ; repartir ; répéter ; répliquer ; répondre ; reprendre ; réprimander ; réprouver ; requérir ; résister ; ressasser ; résumer ; rétorquer ; révéler ; revendiquer ; réviser ; ricaner ; riposter ; rire ; risquer ; ronchonner ; ronronner ; rouscailler ; rouspéter ; rugir ; saluer ; s’exclamer ; scruter ; seriner ; sermonner ; siffler ; signaler ; signifier ; sélectionner ; soliloquer ; solliciter ; sommer ; stigmatiser ; souffler ; souligner ; soupçonner ; sourire ; souscrire ; soutenir ; se souvenir ; suggérer ; supplier ; supputer ; susurrer ; taquiner ; tempérer ; tempêter ; tenter ; terminer ; tonitruer ; tonner ; traduire ; vanter ; vérifier ; vilipender ; vitupérer ; vociférer ; vomir ; zézayer, zozoter

Les répétions paraissent impossibles avec tant de propositions... Sauf qu'il est facile d'abuser des verbes de paroles et votre prose risque de s'en trouver plombée...

 

II. Les verbes de dialogues : des mots de plomb

King

Dans son ouvrage Écriture mémoire d'un métier, Stephen King nous adjure de ne pas abuser de l'utilisation de ces verbes de parole. Si je ne suis pas toujours d'accord avec les préceptes de de cet auteur, le piège qu'il évoque me paraît des plus réels !

Même la meilleure prose pâtirait d'un abus des verbes de dialogues... Une preuve de ce que j'avance ? Très bien... Prenons un classique du répertoire du dix-huitième siècle : Le jeu de l'amour et du hasard. Dans cette comédie de Marivaux, j'ai choisi la sixième scène de l'Acte II. Lisette et Arlequin, déguisé respectivement en leur maîtresse et maître, sont tombés amoureux. Prenons le début de leur tête à tête...

ARLEQUIN

Enfin, ma reine, je ne vous quitte plus car j'ai trop pâti d'avoir manqué de votre présence, et j'ai cru que vous esquiviez la mienne.

LISETTE

Il faut vous avouer, Monsieur, qu'il en était quelque chose.

ARLEQUIN

Comment donc, ma chère âme, élixir de mon cœur, avez-vous entrepris la fin de ma vie ?

LISETTE

Non, mon cher, la durée m'en est trop précieuse.

ARLEQUIN

Ah, que ces paroles me fortifient !

LISETTE

Et vous ne devez point douter de ma tendresse.

ARLEQUIN

Je voudrais bien pouvoir baiser ces petits mots-là, et les cueillir sur votre bouche avec la mienne.

MarivauxGameLoveChance

Bien entendu, on ne peut nier une seconde que c'est fort bien écrit. Mais que se passerait-il si on collait un verbe de parole poussif à chaque réplique ?

Arlequin se plaignit :

— Enfin, ma reine, je ne vous quitte plus car j'ai trop pâti d'avoir manqué de votre présence, et j'ai cru que vous esquiviez la mienne.

— Il faut vous avouer, Monsieur, qu'il en était quelque chose, confessa Lisette.

— Comment donc, ma chère âme, élixir de mon cœur, avez-vous entrepris la fin de ma vie ? s'indigna-t-il.

— Non, mon cher, la durée m'en est trop précieuse, protesta-t-elle.

— Ah, que ces paroles me fortifient ! se réjouit le jeune homme.

— Et vous ne devez point douter de ma tendresse, confirma Lisette.

— Je voudrais bien pouvoir baiser ces petits mots-là, et les cueillir sur votre bouche avec la mienne, s'enflamma-t-il.

Vous remarquerez que le dialogue, si plaisant au départ, perd toute sa légèreté. Si vous en doutez, il suffit de prendre le temps de lire cet échange à haute voix... Convaincu ? Bien entendu, on peut tout à fait piocher dans la liste donnée précédemment mais gardez à l'esprit d'utiliser les verbes de parole avec parcimonie.

 

III. Comment éviter l'abus des verbes de dialogues ?

 

Malgré toutes mes mises en garde, il faudra bien faire intervenir le récit dans les échanges un peu long. Cela permet de garder un certain dynamisme dans la scène en question.

Déjà nul besoin de rappeler à chaque réplique qui est l'interlocuteur, faites-le seulement de temps à autre et préférez les verbes simples. Enfin on peut très bien utiliser le mouvements de nos personnages pour introduire un dialogue. Par exemple :

« Surprise, Annie se pencha vers la jeune femme :

Il s'est passé quelque chose ? »

Pour conclure, je dirais aussi que si vos personnages sont bien construits, ils auront leur propre « voix ». Ces dernières seront alors suffisamment reconnaissables pour pouvoir se passer facilement de certains verbes de dialogue.

 

Et vous, quelle place tiennent les verbes de dialogue dans vos écrits ?

 

16 septembre 2017

Consigne d'écriture n°10 - «Terre»

 

La consigne

Un thème lié aux quatre éléments que nous ferons tous au fil du temps : Terre

 

Mon texte

 

Racines en terre

Compter mes racines

Me donne des forces

Ma terre sanguine

Nourrit mon écorce

 

Mon CV est à terme

Je dois être mobile

Mais ma terre reste ferme

Mes élans malhabiles

Région en bandoulière

Et le cœur indocile

Sur mon âme, des lierres

Ma terre au bord des cils

 

Compter mes racines

Me donne des forces

Ma terre sanguine

Nourrit mon écorce

 

Les pieds rivés au sol

Laissez-moi ma région

Elle reste ma boussole

Mes entrailles de Lyon

Car à fond et à flore

Partir c'est m'enterrer

Pas de ruée vers l'or

Impossible d'errer

Car à terre et à flore

Mon amour enferré

Je compterai encore

Mes racines au carré

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